« 11 mai 2020. La France se déconfine, sans savoir qu’elle se reconfinera. À Paris, les rideaux des commerces s’ouvrent, les rues s’animent. Pourtant, dans les retrouvailles, les discussions, les médias, revient en boucle l’idée que “la vraie vie est ailleurs”. Ailleurs, au vert, boum immobilier sur les maisons avec jardin, renouer avec la nature, télé-travailler les pieds dans l’herbe, j’entends ces injonctions et celle, plus courante encore car contenant toutes les autres, du « retour aux sources ». Je décide de la prendre au pied de la lettre. Je suis parisien. Si j’ai une source, c’est celle de la Seine, ce fleuve si familier qu’il se confond avec nos rues, même couleur, même vision coutumière qu’on ne remarque plus. Je vais faire un retour à ma source.
J’apprends qu’elle se trouve dans une ville appelée Source-Seine, à 260 km au sud-est de la capitale. Bien sûr, j’entends « source saine », c’est trop beau, ils ont dû faire exprès. Pour s’y rendre, on traverse ces terres nouvellement convoitées, qui rendent possible le pavillon : la Seine-et-Marne, la Marne, l’Aube, la Côte d’Or… plus on s’éloigne, plus les noms donnent envie.
Je veux suivre ce trajet, de Paris jusqu’à la source. Photographier cette nature mêlée d’urbain qui nous fait rêver soudain. Faire l’un de ces voyages à proximité auquel le « plan de soutien au secteur touristique » nous incite. Rencontrer les habitants des berges, ceux qui sont venus, ou restés, pour la Seine, il paraît que sa présence apaise. Avec le fleuve comme fil conducteur, partir en explorateur des terres de la maison avec terrain, de ce désir né du temps confiné, de cet eldorado du monde d’après… Partir mais ne surtout rien chercher. »
Frédéric Stucin
« Nous sommes les héros discrets d’une histoire que nous rêvons. Il peut arriver, certains soirs où nous courons encore plus vite et plus éperdument que d’habitude, que nous croyions être des héros de la vraie vie. Alors nous inventons des exploits à notre mesure, nous nageons un peu trop loin dans l’eau ténébreuse, nous dansons sur un toit mouvant, nous nous créons des fantômes splendides que l’aube fera s’évanouir. »
Marie NDiaye
Ce livre d’auteur signe la rencontre entre le photographe Frédéric Stucin et l’une des plus belles écritures de ce siècle, Marie NDiaye.
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