Errance dans une cité imaginaire, Metropolia invite le lecteur à une déambulation onirique ponctuée de rencontres énigmatiques. L’espace urbain s’appréhende par fragments, se devine au fil des silhouettes qu’on y croise. Brumes, grains explosés, lumières parfois saturées, nuances de gris, couleurs monochromes jouant avec des bleus froids ou des orangés chauds, chez Bogren l’expérience visuelle se fait sensible.
Metropolia
Dans cette déambulation urbaine entre rêve et réalité, Martin Bogren fait intervenir pour la première fois des photographies en couleur qui viennent ponctuer le N&B : L’usage de la couleur a été une façon de me rebeller contre moi-même, comme le photographe l’explique dans l’entretien du livre, de voir si je pouvais faire quelque chose de totalement nouveau. Avec le noir et blanc, je commençais à savoir un peu trop ce que je faisais, alors que la couleur était comme une langue étrangère que j’ai lentement apprise. Mais, à vrai dire, mes images en couleur sont très monochromatiques.
Où sommes-nous ? Dans une cité peuplée de présences solitaires, immergées dans une ville aux façades qui ressemblent à des murailles : il s’agit de voir au-delà des apparences, de passer de l’autre côté du miroir, perdre pied pour mieux voir.
Chaque image est une vision, saisie alors qu’elle semble se dissoudre sous nos yeux : on distingue des passages, des architectures, les couloirs d’une station de métro, au loin une île hérissée de buildings. L’errance est aussi faite de rencontres, de personnages saisis sur le vif, telles des apparitions, les yeux clos parfois, enfermés dans leur monde intérieur, souvent pris en close-up. Saisir l’intimité, dire le fragile, donner à voir l’impermanence des choses : l’univers visuel de Martin Bogren révèle l’illusion du monde. Ses images captent sur leur surface un réel qui se dérobe mais que l’art du photographe a su saisir in extremis, à la dérobée. La vie est un songe et toute réalité n’est qu’illusion, pour reprendre Pedro Calderon, et plonger dans l’irréalité demeure un plaisir.
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